"Fuck 'Em All" : L'ascension psychotique des Geto Boys
Tas
Tappas disait : ''Il y a trois versions pour chaque
histoire : ma version, ta version, et la vérité''. Mais
que croire quand l'histoire est narrée par des personnages
instables, aux personnalités parfois multiples ? C'est la question
que l'on peut légitimement se poser dès que l'on entend des
anecdotes sur les Geto Boys circuler lors de documentaires ou
interviews. Des on-dit tellement incroyables que lorsque que l'on se
décide enfin à s'attarder sur le groupe de Houston, on s'aperçoit
qu'elles n'étaient que banales et perdues au milieu d'un monstre
fait de plus de quinze années de violence, de coups de feu, de
liasses de billets verts, de sexe, de paranoïa, d'ennuis judiciaires
et de troubles mentaux. Rien n'est considéré comme impensable quand
on parle de la réalité du groupe le plus excitant que le hip hop
n'ait jamais connu.
Il n'y avait plus que deux membres originaux restants : DJ Ready Red et Little Bill (aka Bushwick Bill), un nain originaire de Jamaïque qui est l'ancien breakdancer du groupe. James de Rap-A-Lot choisit donc d'ajouter Brad 'Scarface' Jordan, un rappeur et dealer de crack avec une réputation solide, ainsi que Willie D., un fils de pute glacial, la dureté de la rue en une seul bonhomme, qui en plus venait de pulvériser tout le monde dans les battles de rap. Quelque chose comme 13 victoires de suite. Il aurait même humilié Vanilla Ice à deux reprises! Cette recette sera aussi létale qu'une rafale de AK-47.
Par
où commencer ? Pour mieux comprendre les origines, faisons un
bond en arrière et revenons en 1986. Un groupe signé sur le jeune
label Rap-A-Lot, 'Ghetto Boys', sort un single, ''Car Freaks'', qui
fait un petit boucan localement dans les quartiers de Houston. En
1988, leur premier album ''Making Troubles'' se retrouve dans les
bacs : très générique, sans inspiration ni folie, seulement
des chaînes en or et un flot sonnant comme un énième plagiat de
Run DMC. Le groupe venant du Sud des Etats-Unis, peu de médias et de
distributeurs s'y intéressent à cette période et l'album fait
rapidement un flop, ce qui pousse le groupe à se séparer. Se
séparer ? Hmm c'est plutôt le moment exact où la bombe
artisanale commence à être fabriquée, parée à exploser à la
face du monde. ''Fuck 'Em All !''
Il n'y avait plus que deux membres originaux restants : DJ Ready Red et Little Bill (aka Bushwick Bill), un nain originaire de Jamaïque qui est l'ancien breakdancer du groupe. James de Rap-A-Lot choisit donc d'ajouter Brad 'Scarface' Jordan, un rappeur et dealer de crack avec une réputation solide, ainsi que Willie D., un fils de pute glacial, la dureté de la rue en une seul bonhomme, qui en plus venait de pulvériser tout le monde dans les battles de rap. Quelque chose comme 13 victoires de suite. Il aurait même humilié Vanilla Ice à deux reprises! Cette recette sera aussi létale qu'une rafale de AK-47.
1989 voit la sortie de ''Grip It ! On That Another Level''. Outre le fait que leur nom s'écrive maintenant 'Geto Boys', le plus gros changement se fait dans leur approche ainsi que dans leur vision, qui est radicalement différente des autres rappeurs de l'époque. Ils parlent de la face sombre de l'être humain, de l'horreur, de la violence, du suicide, des problèmes mentaux, … Le tout mêlé à des gimmicks ou morceaux devenus classiques ('Size Aint Shit', 'Let AHoe Be A Hoe', 'Scarface') associés à la vie de rue, de gangster. C'est ce qui fait la force des Geto Boys, ils mettent tout sur la table, ouvrent leur cœur et le font saigner sur une feuille. La vérité sort, belle ou mauvaise. 'Mind Of A Lunatic' est une des chansons les plus représentatives et cinglées pour un album rap de l'époque. Le premier couplet de Bushwick Bill assène un flow hardcore sur un beat meurtier, à l'image des lyrics flirtant avec la mort, le viol, la nécrophilie, ponctué d'un ''voilà ce qu'il se passe dans la tête d'un taré'', puis, détaillant une fusillade avec les forces de l'ordre, ''les flics valent plus rien quand ils font chier un putain de taré''. Scarface enchaîne avec une phrase qui deviendra légendaire ''I sit alone in my four cornered room / je suis assis seul entre quatre murs'', racontant de façon visuelle les flash mentaux qui surgissent, la vision des corps qu'il a démembré, de ses anciennes victimes, et impulsivement s'en va faire un massacre, coupe la gorge de sa belle mère et l'enterre dans le jardin - ''Now granny's on her way to meet the devil'', et ça escalade jusqu'à des tirs en rafales échangés avec ces fils de pute de flics, un otage sous le bras, dans un dernier élan de violence suicidaire. L'exemple parfait de ce qui fera la légende des Geto Boys.
Le super-producteur Rick Rubin (Run DMC, Slayer, Beastie Boys) a eu vent de cet album, et remixe dix des morceaux pour faire le disque désormais classique ''The Geto Boys'' avec les mugshots des quatre membres en pochette. Cet album leur donne un avant goût du succès international qui les attend. Mais le réalisme et la folie de leurs paroles ne sont pas que pour instaurer une ambiance dans des chansons, il s'agit d'une catharsis vitale pour chacun des membres du groupe, qui flirtent tous plus ou moins avec la psychose.
Scarface
est diagnostiqué bipolaire depuis son adolescence. La plupart du
temps, que ce soit quand il dealait dans la rue, sur scène ou en
studio avec Geto Boys, il se sent perpétuellement dépressif et
suicidaire, chaque minute est une goutte d'eau de plus sur la tête.
''J'ai jamais vraiment su ce qui ne tournait pas rond chez moi,
mais c'est devenu sale, vraiment sale. Je gobbais des pillules comme
des bonbons et je déconnais avec un flingue chargé et prêt à
tirer collé sur ma tempe. Je n'ai jamais appuyé sur la gâchette,
mais ça m'a amené dans des endroits très sombres, et une fois que
j'y étais, je ne faisais pas grand chose pour me tirer de là. Je ne
suis toujours pas sur d'avoir été heureux une seule fois dans ma
vie. J'ai seulement l'impression que mon âme est tourmentée. C'est
étrange. Il y a des moments où l'on se sent bien, mais à la fin de
la journée quand t'y repenses, tu te demandes « Et ben mec,
t'es heureux là ? ». Neuf fois sur dix, la réponse est
''Nah''. C'est le truc avec le fait d'être déprimé. Tu ne sais pas
vraiment d'où ça vient, tu sais juste que tu ne te sens pas bien.
Et même quand les choses ont l'air de rouler en dehors, il y a
toujours un truc qui cloche, et tu n'arrives pas à mettre le doigt
dessus. Même quand on trouve la plupart des raisons qui contribuent
au fait que l'on se sente plombé, quand tu jettes un œil à toutes
ces raisons une par une, ça n'a pas de sens. Ça n'explique pas à
quel point tu te sens mal.''
La
drogue, la violence, les drive by, les funérailles de proches et
d'amis de leur âge, ça leur tape tous sur le système et les
plombe. Quelques mois à peine sont passés et les Geto Boys sont
déjà l'ennemi public numéro un aux Etats-Unis. La différence avec
les autres artistes, c'est qu'ils ont laissé couler, ils ont ajouté
ça à leur pédigré et étaient fins prêts pour la guerre.
Scarface lance nonchalamment ''L’Amérique a toujours aimé ses
bons voyous, et nous étions sans foi ni loi. (…) Bordel,
moins de six mois après que l'abum ''The Geto Boys'' soit sorti, ils
ont d'une certaine manière réussis à nous lier à un meurtre qui
n'avait absolument rien à voir avec nous. On était même pas
présent dans cet État ! Ces conneries devenaient tellement
dingues, je n'arrivais même pas à suivre ce qu'il se passait. Tout
ce que je sais c'est que des gamins étaient à une fête dans une
petite ville du Kansas et j'imagine qu'ils écoutaient ''The Geto
Boys'' ou ''Grip It !'' - un des deux. Ils avaient bu, fumé de
la beuh et sur le chemin pour rentrer, ils ont décidé de shooter un
type en pleine tête, sans raison. Enfin j'imagine, j'en sais rien.
Mais, au final quand ils sont allé au tribunal, ils ont clairement
décidé qu'il y en avait une, de raison – Les Geto Boys les ont
poussé à faire ça ! Ils disaient avoir été ''temporairement
hypnotisés'' par la chanson ''Trigga Happy Nigga''. (…) Mais ça
ne s'est pas arrêté là.
Un
an plus tard, je me suis retrouvé dans le même genre de merde
encore une fois, quand un gamin venant du même milieu que moi tua un
flic au Texas après avoir été interpellé entre Houston et Austin.
Il n'a pas sorti qu'il avait été ''hypnotisé'' comme le mec au
Texas, mais il essaya quand même en avançant que les années
d'écoutes répétées de mes disques ou ceux de Tupac avait en
quelque sorte contribué au fait qu'il ait appuyé sur la gâchette
cette nuit là. (…) Dans les deux cas, le jury n'y a as cru, et en
plus de ça le gars au Texas a fini par être condamné à mort. Ce
truc c'est des conneries pour moi parce que je sais pour l'avoir vécu
à quel point les flics peuvent te niquer quand t'es un jeune noir,
surtout dans le Sud où le bon p'tit gars et les mentalités de
cowboys font la loi dans le coin. Je me rappellerai toujours quand
j'avais sept ou huit ans, quelques copains et moi faisions du vélo
dans le quartier quand on est passé à côté d'une scène de crime.
Un des flics nous a fait signe de venir pour nous demander ce qu'on
foutait là, et il se rapprocha pour dire 'Où est ce que vous étiez
les gars ? Ça sent le melon. Vous avez mangé du melon les
gars ?' Et on avait pas pigé à l'époque. (…) Ce n'est que
plus tard que j'ai compris ce qu'il voulait dire et qu'il nous avait
balancé des putains de blagues racistes de merde en plein dans nos
gueules. A des gamins ! C'est la culture dans laquelle on a
grandi, et ça n'a rien de joli. J'ai toujours su pourquoi on faisait
la musique qu'on faisait, tout comme je sais à quel point une vie de
racisme latent ou flagrant et d'oppression peut te donner envie de
choper une arme et shooter ton oppresseur, ou t'exploser la tête.
(…) Enfin bon, je n'ai pas été sur ce pont avec ces gamins au
Kansas cette nuit là et putain c'est clair et net que je n'étais
pas assis à côté du mec au Texas à lui dire d'appuyer sur la
gâchette et de buter ce flic. Et comme je dis dans ''Hand Of A DeadBody'', Gangsta NIP, Spice-1 ou Tupac n'avaient rien à voir avec
tout ça non plus. Ces gamins ont tous fait leurs propres choix.
La
machine est lancée, et plus personne ne peut les arrêter à
présent. Geto Boys entament de grandes tournées au travers des
Etats-Unis, dont une gigantesque aux côtés des grands noms du
moment, Ice Cube, Too Short et A Tribe Called Quest. Tout roulait
comme sur des roulettes pour le groupe mais les membres, bien qu'ils
soient proches, ne sont pas non plus les meilleurs amis du monde,
seulement de bons partenaires dans un projet musical. A ce moment là,
Scarface décide qu'il est temps de se focaliser sur un disque solo,
comme il le voulait depuis des années, pour pouvoir poser à plat
tous ses maux, ses expériences personnelles, ses propres beats avec
l'aide de ses amis, surtout Doug qui avait son propre studio, et son
oncle qui est un bassiste et multi-musicien hors-pair. Des tonnes de
drogues ingérées sur ''Dark Side of the Moon'' de Pink Floyd lui
donnent une nouvelle dimension et approche pour l'atmosphère et les
instrumentaux, les disques de Lou Reed & Velvet Underground
l'inspirent pour le flow et la façon de raconter les histoires du
quotidien. C'est durant ces sessions qu'il enregistre la première
version de 'My Mind Is Playing Tricks On Me', mettant sur bande toute
la douleur qu'il ressent à l'intérieur depuis toujours. Sa
dépression, sa paranoia, ses hallucinations et tout ce côté obscur
enfoui en lui, par dessus un sample d'Isaac Hayes. Comme il
enregistre aussi un nouvel album de Geto Boys en même temps, il fait
écouter le titre à plusieurs personnes hauts placées et tout le
monde devient dingue, sûrs et certains que ça allait être un
carton. James de Rap-A-Lot réussit à convaincre Scarface de garder
ce morceau pour l'album des Geto Boys, et d'enlever des couplets pour
laisser la place aux deux autres. Au lieu de ça, il fait un
compromis et donne les lyrics du dernier couplet à Bushwick Bill,
tandis que Willie D fait bondir tout le monde dans le studio, en
prenant à contre pied le thème de maladie mentale de la chanson et
en l'adaptant au ghetto avec ces premières lignes... ''I got big
money, I drive big cars...'', le reste fait partie de
l'histoire... Will évoque ce sentiment de paranoïa courant pour
les gars dans la rue, ce sentiment permanent que quelqu'un vous
observe, vous suit et vous veut six pieds sous terre ou enfermé
pendant deux décennies. Le morceau devient un hit dans tout le pays
et, sorti de nul part, nique tout sur son passage quand personne ne
s'y attend. Des Billboards aux radios, dorénavant tout le monde sait
qui sont les Geto Boys.
Mais
un mois avant la sortie de l'album, un tragique événement devient
irrémédiablement lié aux Boys, aussi effroyable que légendaire.
Le 19 Juin 1991, Bushwick Bill passe la soirée dans un club de
Houston, avale des quantités astronomique d'Everclear et de Gin,
fume du PCP en pensant être de l'herbe, et au moment de rentrer chez
lui, il est dans un état quasi psychotique. C'est là que la suite
des événements diffèrent. Bill aurait eu une crise de rage et de
dépression avec des pulsions suicidaires. Sa copine essaye de
comprendre ce qui se passe et se prend des coups dans la tronche,
puis il prend un fusil et lui tend, lui disant de le tuer, il évoque
à un moment comme raison que ça pourrait faire de l'argent avec
l'assurance vie. Des pleurs et des cris éclatent, elle attrape l'arme et
essaye de le stopper et de le calmer, mais quand il braque le canon
du fusil sur sa tronche et se met à menacer leur bébé de 8 mois,
une confusion s'installe, des baffes et cris fusent et le coup part
tout seul, la balle se logeant dans son œil droit. Considéré mort
par le légiste sur place, il est embarqué dans un sac direction la
morgue. C'est là que Bushwick Bill se réveille, vers sept heures du matin le
lendemain, alors qu'ils s'apprêtent à faire une autopsie. La tête
toujours dans le brouillard, il se lève et pisse par réflexe... sur
un flic qui reste planté là de choc pendant quelques secondes,
avant de partir en hurlant 'Il
s'est réveillé, à l'aide !'.
C'est vrai que se faire uriner dessus par un nain borgne qu'on
croyait encore être un cadavre quelques secondes plus tôt, ça doit
faire bizarre. Quand on les appelle pour leur faire savoir la
nouvelle, Willie D et Scarface accourent à l’hôpital pour être
aux côtés de Bill. C'est à ce moment que le boss de Rap-A-Lot leur
suggère que ça ferait une pochette mortelle si 'Face et Willie
entouraient Bushwick Bill, assit sur le lit d’hôpital dans le
couloir avec le pansement tombant, laissant apercevoir la blessure.
Will et Brad ne sont pas vraiment chauds, puis se laissent convaincre
péniblement. Cette photo finira en pochette de leur prochain album
''We Can't Be Stopped', et plus de 25 ans plus tard, je pense que
c'est une des histoires les plus cinglées que j'ai entendu, au moins
dans le top 10. Qui peut se targuer d'avoir son certificat de
naissance ET de décès dans son tiroir ? Rapidement remis sur
pied et encore plus fou qu'avant, croyant avoir vu l'Enfer durant
cette expérience, il s'en sert pour en faire le sujet des morceaux
''Chuckie'', ou ''Ever So Clear'' sur son album solo 'Little Big
Man'.
Comme
on dit, il n'y a pas de mauvais buzz, et cette histoire s'ajoute
encore à la crédibilité des Geto Boys, qui trimballent leurs
démons avec eux sur de longues tournées épuisantes aux limites de
la sanité, d'Est en Ouest, du Nord au Sud, avec notamment le tour
''The Greatest Rap Show Ever''. Jazzy Jeff & The Fresh Prince,
Public Enemy, Queen Latifah, Naughty By Nature, A Tribe Called Quest,
tous les grands noms du rap y participent et l'impact est énorme et
décisif sur l'avenir du hip hop. Maintenant c'est une culture qui
est devenu 'mainstream', et les ghetto ne sont plus les cibles
majoritaires. Willie D, Bushwick Bill, Scarface, tous sont fatigués
de cette vague médiatique et de ces tournées aux allures de parcs
d'attractions et se sentent déconnectés de ce milieu. L'album est
un succès mais il est surtout légendaire pour son contenu. Il
deviendra par la suite une pierre angulaire du rap de Houston, avec
les premiers disques de Rakeem et K-Rino, parce que leurs paroles
sont écrites avec le cœur, et parce qu'ils ont des mentalités de
guerriers dans un monde moderne en ruine, ainsi que de témoins d'une
vie passée et à venir. Ils ont encore en tête les flics ripoux et
les fédéraux qui les mettent sur écoute, les potes au quartier qui
finissent dans des cercueils, la dépression qui devient
comme une ombre pour chacun d'eux, et leur honnêteté, leur vérité
brute, devient pour la même raison qu'elle est essentielle pour la
majorité de leur audience, un danger réel selon le gouvernement
Americain.
''Nos
albums sont en gros ce que j'appellerais des 'événements actuels',
tente d'expliquer Bushwick Bill. Dans aucune de nos chansons tu
nous entends dire 'Tue quelqu'un. Prends des drogues. Soit comme ci,
comme ça.' Nous sommes toujours en train de nous demander 'Pourquoi
doit-on vivre comme ça ? Pourquoi les choses sont telles
quelles sont?'. Nous parlons de meurtres et tout, tu vois, parce que
c'est ce qui se passe réellement autour de nous en ce moment, et
c'est ce qu'on peut lire dans le journal, c'est ce qu'on voit dans
nos quartiers, et c'est donc ce dont on parle dans nos chansons...
(…) Ici, t'as de tout. T'as les skinheads, le Ku Klux Klan, t'as
les types qui font du slam-dancing, t'as ces noirs qui se croient à
L.A avec ces merdes bleues et rouges. T'as tout ce que tu veux ici.
T'as les défoncés aux acides, y'a de l'angel dust, t'as les
héroïnomanes, les crackheads, les sniffeurs habituels et tout ça,
y'a tout. (…) T'as déjà vu quelqu'un faire une overdose ? C'est
furieux, mec. Parce qu'ils commencent à agir de façon bizarre, et
ils commencent à s'étouffer et avoir des haut-le-cœur, ils peuvent
plus rien faire par eux mêmes. Ça devait être l'héroine. Gerber
partout et juste, enfin, c'est comme si les yeux roulaient jusqu'à
l'arrière du crâne, drop, ding ! Ils pètent un câble en se
roulant partout avec les sourcils qui battent frénétiquement.Quand
tu vois un mec se faire descendre, tu vois du sang, mais voir
quelqu'un qui ne saigne pas passer par les mêmes phases comme si son
corps était déchiqueté...''
''Ils
voulaient toujours dire qu'on glorifiait la violence ou la vie de la
rue ou les deals de drogue ou le sexe ou n'importe quoi d'autre. Tout
ce qui les rendait mal à l'aise, nous le ''glorifions'', s'énerve
Scarface, Comment veux tu glorifier la réalité ?
L'Amérique est sans cesse à la recherche d'un bouc émissaire pour
expliquer pourquoi elle est en train de se détruire elle-même.
D'abord, c'était le Jazz qui détruisait l'Amérique, ensuite il y a
eu le Rock'n'roll, puis le Disco, et enfin le Rap. Mais vous savez,
je pense que l'Amérique est en train de détruire l'Amérique. Notre
pays est construit sur des règles, des lois et des systèmes de
croyance qui datent des années 170 et 1800, à l'époque de
l'esclavage. Et c'est en train de nous bousiller. Ça engendre la
haine. C'est bien plus profond qu'un disque. La haine vient de
tellement plus loin que ça.
Un pote a moi a bouffé sa femme. Il l'a littéralement tué et mangé. J'ai un ami qui a été descendu chez lui, avec sa copine et tous ses potes. J'en ai un autre qui a été buté par un flic. Donc je pose encore une fois la question : Qui glorifie quoi ? C'est ce que j'ai toujours voulu savoir parce pour moi toute ces trucs arrivent réellement. J'attends toujours la réponse, et j'attendrais probablement toute ma vie.''
Un pote a moi a bouffé sa femme. Il l'a littéralement tué et mangé. J'ai un ami qui a été descendu chez lui, avec sa copine et tous ses potes. J'en ai un autre qui a été buté par un flic. Donc je pose encore une fois la question : Qui glorifie quoi ? C'est ce que j'ai toujours voulu savoir parce pour moi toute ces trucs arrivent réellement. J'attends toujours la réponse, et j'attendrais probablement toute ma vie.''
Comme
vous pouvez le constater, les Geto Boys n'ont jamais eu à inventer
des histoires pour qu'elles paraissent invraisemblables. Quelle est
la part de légende ou de vérité ? Je dirais que toute légende
a sa part de vérité et vice versa. Des tonnes d'autres histoires
invraisemblables ont eu lieu par la suite, d'autres grands disques en
tant que groupe ou solo, des fusillades sur des parking en tournées,
de nouveaux renois qui remplissent les morgues chaque jour un peu
plus, Manhattan Square Garden plein à craquer, Ready Red aurait
trouvé le sample culte 'He's A Paranoiac Menace To Society' de 'Mind
Of A Lunatic' dans un épisode du dessin animé Spiderman, un
enchaînement de problèmes judiciaires, le FBI qui fait du
harcèlement et tente de la faire à l'envers, tous les téléphones
sur écoute, des tirs au pistolet sous acides dans le désert pour
enregistrer des samples, Bushwick Bill à un concert de Weedeater,
des éternelles envies de suicides mais Willie D, Bushwick Bill et
Scarface sont toujours là. Allez choper le livre de ce dernier,
''Diary of A Madman'', ou bien ''Houston Rap Tapes'' de Lance Scott
Walker, lectures plus que conseillées. Pour tous ceux qui sentent
que quelque chose les tirent constamment vers le bas, qui tentent de
faire le vide mais que c'est impossible et que chaque jour est encore
plus dur à encaisser que le précédent. Tous ceux avec le cœur
glacé par une vie de tristesse, déception et dépression. Tous ceux
avec les émotions anesthésiées par les addictions, parce qu'ils
sont fatigués que chaque minute leur cerveau leur joue des tours.
Tous ceux qui pensent que ça ne sert plus à rien d'aller plus loin.
Levez la tête et soufflez, les poings serrés. Maintenant lâchez,
le regard acéré. We can't be stopped.
Discographie
sélective :
Willie Dee – Controversy (1989)
Geto
Boys – The Geto Boys (1990)
Geto
Boys – We Can't Be Stopped (1991)
Scarface
– Mr Scarface Is Back (1991)
Bushwick
Bill – Little Big Man (1992)
Willie
D – I'm Goin' Out Lika Solider (1992)
Geto
Boys – Till Death Do Us Part (1993)
Scarface
– The World Is Yours (1993)
Willie
D – Play Witcha Mama (1994)
Scarface
– The Diary (1994)
Bushwick
Bill – Phantom Of The Rapra (1995)
Geto
Boys – The Resurrection (1996)
Scarface
– The Untouchable (1997)
Scarface
– My Homies (1998)
Willie
D – Loved By Few, Hated By Many (2000)
Scarface – The Fix
(2002)
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